Le Syndrome du Post-it

Trop de gestion tue la gestion

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Philippe Escalle CTO

Comment les managers peuvent sortir du piège des micro-tâches pour redevenir des stratèges.

Il était une fois un manager. Il était vaillant, stratège, inspirant… puis un jour, il a collé un post-it sur son écran. Puis deux. Puis dix. Et aujourd’hui, on ne le voit plus. Littéralement. Il a disparu sous une montagne de micro-tâches, de to-do lists, de rappels multicolores. C’est ce qu’on appelle le syndrome du post-it.

Le vrai mal : le micro-management 2.0

Ce n’est pas qu’on aime tant les post-its. C’est qu’on ne supporte pas l’idée qu’un sujet, aussi minuscule soit-il, puisse avancer sans nous. Alors on crée un Trello par idée, un tableau pour chaque sous-problème, une réunion pour chaque virage de projet. C’est du micro-management déguisé en méthode.

Et ce n’est pas réservé aux managers : certains chefs de projet tombent aussi dans le piège. Ils veulent tellement "piloter" qu’ils finissent par décortiquer la recette de la tarte aux pommes pour chaque feature :

  1. acheter des pommes

  2. laver les pommes

  3. éplucher les pommes

  4. couper les pommes...

Résultat : on finit avec un backlog qui ressemble à une recette de cuisine de 12 pages et une équipe qui perd de vue la tarte.

⚠️ Ne pas confondre cahier des charges conceptuel (le quoi) avec cahier des charges technique (le comment). Tout vouloir détailler, c’est parfois une façon déguisée de se rassurer sur son rôle. Et c’est là que la surcharge cognitive devient collective.

Ce besoin de tout monitorer, organiser, compartimenter finit par créer une surcharge cognitive aussi inutile qu’invisible. Au final on perd du temps à gérer le travail… au lieu de faire le travail ! C'est ballot.

Le mirage de la to-do list (et la dopamine qui va avec)

Une tâche cochée = une décharge de dopamine. C’est scientifiquement prouvé. Le manager moderne devient alors accro à cette mini-victoire : planifier, lister, cocher. Mais pendant ce temps, la stratégie, la vision, la prise de recul ? Aux oubliettes.

Derrière l’apparente efficacité se cache une véritable charge mentale professionnelle, comme le décrit très bien le site Temps et Équilibre. On pense à tout, tout le temps. On traite les urgences des autres comme priorités personnelles. On est gestionnaire de listes plutôt que leader d'équipe.


L’illusion du contrôle : quand la productivité devient toxique

J'ai trouvé cet article de TF1 Info, les to-do lists sont devenues des doudous modernes. Elles nous rassurent. Mais elles peuvent aussi nous enfermer. On coche, on coche, mais sans jamais se demander si ce qu’on fait est vraiment utile. L'efficacité sans direction, c'est comme courir sur un tapis de course en espérant arriver à la plage.

Et c’est pire quand les outils digitaux s’en mêlent. Slack, Notion, Trello… autant de post-its 2.0. On passe plus de temps à organiser le travail qu’à le faire. Le syndrome du post-it est partout, même dans le cloud.

Du post-it au burnout : la pente glissante

Le blog Simple et Organiséeparle de "maladie du post-it" à titre personnel. Dans le monde du travail, ça devient collectif. Réunions non-stop, sollicitations constantes, sentiment d’inachèvement permanent… Le manager croule sous la pression invisible d’être partout à la fois. Et finit par n’être nulle part efficacement.

Alors, on arrête tout ?

Non. On repriorise. On délègue. On ose dire non. Le manager n’est pas un assistant personnel pour chaque membre de l’équipe. C’est un chef d’orchestre. Et un chef d’orchestre ne joue pas du triangle pendant tout le concert.

L'oeil du CTO

" Si vos managers passent leurs journées à cocher des cases, c’est qu’ils ne pilotent plus rien. Ils gèrent des checklists, pas des projets. Alors avant le prochain outil miracle de productivité, posez-vous la bonne question : avez-vous besoin d’un nouveau tableau Kanban ou d’un vrai temps de pensée ? Un bon manager ne se mesure pas au nombre de tâches accomplies, mais à la qualité des décisions qu’il prend pour l’équipe. "