Chasseur de tête

Interview

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Philippe Escalle CTO

Parmi les nombreuses compétences d’un CTO, il en est une particulièrement chronophage : le recrutement.

Identifier les talents est une chose, mais les convaincre en est une autre ! D’autant plus que l’on entend souvent dire que la génération Z est compliquée, qu’elle privilégie sa vie personnelle à sa carrière... Personnellement, je pense qu’ils ont raison ! Après tout, à mon époque, nous pensions la même chose, mais nous n’avions pas la puissance des réseaux sociaux pour partager nos idées et rassembler autour d’une vision, qu’elle soit bonne ou mauvaise.

Dans le cadre de cette mission de recrutement, il arrive que l’on fasse appel à des chasseurs de tête. Un terme plutôt évocateur, voire un peu agressif ! Certains sont spécialisés dans la tech et disposent d’un réseau impressionnant. Pourtant, lorsqu’on aborde des sujets techniques avec eux, on réalise souvent qu’ils sont ancrés dans des clichés et des stéréotypes.

Un exemple frappant : en 2019, lorsque je mettais en avant Vue.js sur mon CV, la plupart des recruteurs me lançaient avec un sourire en coin : "Vue ? C’est dépassé !" Puis, un an plus tard, avec la sortie de Vue 3 et l’enthousiasme de la communauté, ces mêmes recruteurs revenaient à la charge avec : "J’ai une opportunité sur une techno très tendance… Vue.js, ça vous intéresse ?"

Le CTO aime s’entourer d’un bon réseau, c’est vrai. Mais dans le cadre du recrutement, il est essentiel de ne pas seulement s’entourer de personnes compétentes, mais aussi de celles avec qui l’on peut avoir des échanges constructifs, au-delà de leurs intérêts personnels.

C’est dans cette optique que j’ai souhaité solliciter Franck Taieb, qui travaille pour le cabinet de recrutement KENT, afin de lui poser quelques questions sur le recrutement des profils CTO.


Site e-kent.fr




PE : Bonjour Franck, pouvez-vous vous présenter ?
FT : Je suis Franck Taieb, issu d’une formation en école d’ingénieur en réseau et télécom, pour finir par un master en commerce et marketing. À la sortie de l’école, j’ai intégré KENT et cette belle histoire dure depuis maintenant 15 ans. Spécialisé en IT, en assistance technique et en recrutement informatique, je suis capable d’échanger avec l’ensemble des directions IT et de tenir une conversation sur n’importe quel sujet. De l’infrastructure aux études, du web à la production, du support au management, je suis capable de comprendre les besoins en ressources humaines tout en répondant aux problématiques techniques.

KENT est une ESN spécialisée en informatique, capable de répondre aux besoins des clients lors de renforts d’équipe ou de remplacements sur les métiers de l’IT. Elle s’est développée en proposant aux sociétés le mode cabinet de recrutement afin d’aider les entreprises à recruter leurs collaborateurs IT. Nous sommes spécialisés, mais généralistes sur l’ensemble des métiers que compose ce beau métier. Peu importe la technologie, le vernis ou l’orientation, nous répondons aux besoins des entreprises. Nous mettons au centre la relation humaine, car un recrutement réussi, c’est une feeling et une accroche mutuelle.

PE : Selon votre expérience, à quel moment un développeur peut-il légitimement proposer ses services en tant que CTO ?
FT : Il n’y a pas spécialement de moment, tout dépend de l’opportunité, d’un coup de chance ou de la taille de l’entreprise. Quelqu’un qui a 3 ans d’expérience, très apprécié dans l’entreprise, peut se voir proposer le poste si le CTO quitte l’entreprise. Indépendamment de cela, je dirais au bout de 10 ans avec une maîtrise technique, puis une évolution en tant que PO ou CP, avant d’arriver CTO.


PE : Voyez-vous des variations significatives en fonction de l'industrie ou de la taille de l'entreprise ?
FT : Oui, bien entendu. Plus l’entreprise est grande, et plus il sera difficile d’obtenir ce poste. Il sera demandé une expérience importante, y compris en tant que CTO. Le premier job de CTO se fera par évolution logique dans sa propre entreprise, ou par piston, ou parce que la personnalité du candidat prendra le dessus sur l’expérience, et l’entreprise donnera la chance grâce à cette personnalité.


PE : Selon vous, le poste de CTO est-il davantage associé aux startups ou aux grandes entreprises et quelles différences majeures observez-vous dans les attentes pour ces deux types d'organisations ?
FT : Ce poste est utilisé dans tout type d’entreprise, et a d’ailleurs changé. À l’origine, un CTO était une sorte de directeur technique WEB, maîtrisant la chaîne d’application web ou de site dans les agences ou les startups. Aujourd’hui, les grandes entreprises s’en sont accaparées et il devient le manager du DSI, en tant que responsable stratégique et membre du COMEX.


PE : On demande tout à un CTO, mais quels sont les critères prioritaires pour les clients lorsqu'ils recherchent un CTO (expertise technique, compétences managériales, vision stratégique, réseau professionnel, etc.) ?
FT : Tout dépend de la taille de l’entreprise. Une startup demandera compétence technique, management et stratégie commerciale. Une grande entreprise demandera compétence technique mais une plus grande expérience sur la stratégie et sur les enjeux de l’entreprise. Comment l’informatique peut aider les enjeux de l’entreprise.


PE : Comment évolue la perception du rôle de CTO chez vos clients ces dernières années, notamment avec la montée de l'IA, du cloud computing, et des méthodologies agiles ?
FT : Je l’ai dit plus haut avec cette phrase : Comment l’informatique peut aider les enjeux de l’entreprise. Plus un enjeu d’aide à l’entreprise, alors qu’auparavant il s’agissait plutôt d’une orientation : comment utiliser l’informatique afin de vendre plus.


PE : Quels conseils donneriez-vous à un développeur ou à un candidat potentiel pour se positionner efficacement sur un poste de CTO dans un marché compétitif ?
FT : Encore une fois, un CTO ne vient plus forcément du monde du dev, et ce métier a été changé. Il reste toutefois existant dans le monde des agences et des startups.


PE : Le conseil, si le développeur souhaite devenir CTO, serait le suivant :
FT : Maîtriser la chaîne technique (dev, test, recette), s’intéresser au métier (fonctionnel + projet, et chefferie de projet), monter en compétence sur les aspects d’architectures et de coût (coût en homme, licence…), et lire les articles de l’entreprise ciblée afin d’être force de proposition sur la stratégie.


PE : Merci Franck.